Au fil de l'eau, au gré du vent  …

On gagne l’Espagne

Info : les mots surmontés d’un astérisque* sont expliqués dans le lexique d’Adam à la rubrique «les mots du bateau » dans la page des enfants.

Vendredi 21 octobre

En mer / Carthagène (Espagne)

La nuit se poursuit tranquillement avec un vent constant et sans orage. Nous avons cependant été bien trempés et sommes obligés de nous changer intégralement afin de rester au chaud pendant nos quarts de veille. Le soleil se lève enfin. Nous tentons d’avancer en ciseaux* pour ne pas allonger la route. La houle nous gêne beaucoup pour tenir les ciseaux mais nous ne nous en sortons pas si mal que cela. Nous relançons notre ligne et nous attrapons un nouveau beau maquereau que nous nous dépêchons de préparer pour le repas de ce soir.

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Nous arrivons à Carthagène à 16h, fatigués mais contents d’avoir avancé autant. Nous pourrons ainsi faire des pauses plus longues dans les autres escales. Nous commençons à connaître de mieux en mieux notre bateau et parvenons à être de plus en plus confiants dans les manœuvres que ce soit au port ou au mouillage. Notre pas d’hélice* nous entraine de façon importante sur bâbord* dès que l’on enclenche la marche arrière mais Simon gère cela maintenant avec intelligence et anticipation.

Je suis très déçue en arrivant car l’entrée du port est assez laide : c’est un port militaire. On nous avait promis une piscine au port de Carthagène et je me voyais déjà en profiter avec les enfants. Or, la marina avec piscine ne répondant pas à la VHF, nous avons fait le choix de nous diriger vers le Yacht Port de Carthagène juste à côté. L’accueil n’est pas exceptionnel et on nous indique clairement que la piscine, c’est de l’autre côté du grillage. Dommage ! De prime abord le port n’est pas très chaleureux. La fatigue aidant, je fais un petit coup de calgon mais me ressaisis vite car, quand même, je ne suis pas en mesure de me plaindre.

Après les traditionnels passages à la capitainerie, aux toilettes et à l’office de tourisme, nous faisons un tour dans la ville. Quelle ville étrange que celle de Carthagène ! Prise en sandwich entre histoire ancienne et contemporaine, la cité est en pleine mutation. Elle cherche à réhabiliter ses vestiges romains en insufflant une énergie et probablement des sommes pharaoniques à la rénovation de ses ruines. Un monumental travail de recherches archéologiques est mis en place par la ville car les différentes périodes de l’histoire ont peu à peu fait disparaître les anciennes et magnifiques constructions romaines. Cette ville polymorphe nous apparaît ainsi comme une espèce de puzzle dont les différentes pièces ont du mal à s’assembler. Les enfants trouvent un parc de jeux et s’y amusent comme des fous. Dire qu’on paye des fortunes pour les emmener à Disneyland alors que les parcs municipaux sont gratuits et qu’ils peuvent s’y amuser des heures entières !

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Nous avons prévu de rester plusieurs jours ici pour effectuer quelques menus travaux. Eh oui, encore des travaux ! Rien de bien méchant, ce sont plus des travaux de confort. Il y a toujours à faire, comme dans une maison.

Mathieu, le frère de Simon devrait nous rejoindre début novembre à Malaga pour passer les mois de novembre et de décembre avec nous afin de nous aider à traverser jusqu’aux Antilles. Voici un résumé du programme à venir pour vous donner un aperçu du niveau d’adrénaline qui monte en moi petit à petit :

  • Début novembre : 5 à 6 jours de traversée du détroit de Gibraltar aux Canaries. Nous avions envisagé de nous arrêter au Maroc mais de nombreux marins nous l’ont déconseillé. Nous piquerons donc directement sur les Canaries hormis problème technique qui nous obligerait à faire une escale.
  • Fin novembre : 5 à 6 jours de traversée des Canaries au Cap Vert
  • Début décembre : 15 à 20 jours de traversée du Cap Vert jusqu’en Martinique

C’est un vrai défi qui nous attend. C’est à la fois terrorisant et excitant !

Samedi 22 octobre

Carthagène (Espagne)

Au regard des fichiers Grib* des jours à venir, nous décidons de rester à Carthagène jusque mardi. Ce matin, c’est laverie et ship*. Cet après-midi c’est école et visite de l’ancien théâtre romain de Carthagène magnifiquement rénové.

Adam et Samuel sont très déçus car, pour une raison qui nous échappe, ils sont persuadés que nous allons voir un spectacle de Romains (ils s’attendent à un remake de ce qu’ils ont vu au Puy du Fou). Nous avons beau leur expliquer qu’aller dans un théâtre ce n’est pas la même chose que d’aller voir une pièce de théâtre mais c’est peine perdue. Ils nous font à moitié la tête jusqu’au moment où ils découvrent le fameux théâtre et prennent plaisir à jouer eux-mêmes des scènes de gladiateurs sur les planches reconstituées.

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En revenant de notre visite, nous passons à côté du bateau Elida, parfaitement équipé pour des concerts sur l’eau, où un groupe de jeunes chanteurs met toute son énergie à entonner des chants plus ou moins célèbres en l’honneur de JC (ou Jésus Christ). « Sailing for Jesus », un nouveau concept contemporain. Une nouvelle voie pour le Seigneur !

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Finalement, nous nous rendons compte que la vie du port est très animée. De nombreux bateaux restent ici pour l’hivernage* et leurs occupants créent une ambiance familiale et bon enfant qui incite à la rencontre et à l’échange autour de la laverie, des sanitaires ou d’un vidage de poubelles. Nous sommes même invités à un barbecue dès le lendemain midi.

Parmi les différentes personnes croisées au détour d’un ponton, Simon se retrouve nez à nez avec JC (Jean-Claude, pas Jésus Christ), un de ses collègues de la formation moteur faite en juin dernier. Il est à bord de son catamaran Galopin avec 3 amis et, ensemble, ils vont convoyer* le bateau jusqu’aux Antilles où la femme de JC le rejoindra pour profiter de 4 mois de soleil dans les Caraïbes. Comme le monde est petit !

Dimanche 23 octobre

Carthagène (Espagne)

Pour le barbecue de ce midi, je me lance dans la réalisation d’un gâteau à la wanegaine qui me paraît avoir plus l’aspect d’un boulgi boulga immonde que d’une véritable pâtisserie. Finalement, à ma grande surprise, mes biscuits plaisent beaucoup avec leur goût de cannelés croustillants. Pas si mal en fait.

Le barbecue est très sympa. Nous commençons petit à petit à mettre en marche notre anglais. Nous constatons de réels échanges, de longues discussions, des conseils, de l’aide entre les bateaux. De nombreuses langues sont parlées et les enfants commencent à être demandeurs de savoir s’exprimer un minimum en anglais afin de pouvoir échanger avec les autres. C’est décidé ! Dès demain je mets en place l’English Day que j’avais conceptualisé dans mon canapé de Poulainville mais que je n’avais jamais réellement pris le temps de créer.

Quelques bateaux ont prévu de faire le même parcours que nous, notamment dans le cadre de courses encadrées comme l’Atlantic Odyssée ou l’ARC. Cela me rassure car je pensais que nous étions un peu en retard sur le parcours traditionnel. Finalement, nous sommes parfaitement dans le timing.

Je rencontre Valérie, l’heureuse propriétaire du Sacre Bleu 2, un magnifique catamaran de 45 pieds. Elle nous fait faire une petite visite et me propose gentiment des habits trop petits de son fils qui a maintenant 12 ans, des palmes et une planche de piscine. Wahou ! Les catamarans sont effectivement beaucoup, beaucoup, beaucoup plus grands que les monos et bien plus confortables. Je suis avec Samuel et Adam et la présence d’une vraie bibliothèque, d’une vraie salle de bain, de vraies chambres, d’une vraie cuisine et de deux vrais hamsters fait naître des étoiles dans leurs yeux. Malgré tout, de retour vers notre Kusupa, nous faisons le bilan : nous sommes fin bien dans notre petit monocoque, suffisamment à l’étroit pour ne pas passer à côté les uns des autres. Bon, ça dépend des jours en fait !

La fin de journée se déroule tranquillement entre nettoyage, rangement et lessive .

On va visiter l’ancien château où se trouve une exposition de Playmobils. On découvre une vision panoramique de la ville qui conforte l’image de son hétérogénéité : ruines romaines, façades modernes, immeubles contemporains. Ce n’est pas très joli mais cette cité, fortement marquée par son histoire, est touchante.

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Lundi 24 octobre

Carthagène (Espagne)

La plupart des bateaux décident de partir aujourd’hui pour rallier Malaga ou Gibraltar. Cela nous relance sur la question du choix du timing dans les parcours. Avec notre très mince expérience de marins, il est toujours difficile de savoir si nous faisons les bons choix. Nous avons vu qu’un orage arrivait droit sur nous aujourd’hui. Cela ne nous dit rien qui vaille et nous ne sommes de toute façon pas prêts à partir.

Simon trouve un Carrefour qui fait la livraison. Trop bien !! Nous terminons de préparer le bateau pour la navigation de 100 miles de demain. Nos voisins anglais et irlandais sont informés de notre départ et viendront nous filer un coup de main si besoin. Une petite balade en ville termine notre journée.

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Mardi 25 octobre

Carthagène / en mer (Espagne)

Simon prend son courage à deux mains et fait un petit plongeon dans le port pour redéclencher le speedo*. Beurk ! Nous ne savons pas exactement tout ce qui est déversé dans les eaux du port mais ce petit plouf mérite amplement une bonne douche pour être certain de repartir propre. La sortie du port est tranquille et sereine sous le regard de nos compagnons et voisins qui nous saluent longuement. Les fichiers Grib* n’annoncent aucun vent jusqu’à 19h. J’appréhende un peu de devoir mettre le moteur pendant plus de 7 heures d’affilée. Contre toute attente, le vent se lève dès notre départ et s’établit à 10 nœuds. Nous en profitons pour hisser grand voile et génois. Adios Cartagena !

25-10-on-s-envole Quelques heures après notre départ du ponton, me voici à nouveau bien vaseuse. Il me faut absolument penser à prendre un médicament avant chacun de nos départs afin de pouvoir être plus efficace dès la première journée. Les enfants vont très bien par contre. Rien à signaler de cette belle après-midi de navigation hormis une bonne tranche de rigolade lorsque, Samuel ayant envie de faire popo, nous sortons le seau et que le jeune garçon ne se tenant pas suffisamment, glisse et se retrouve coincé les fesses dans l’eau. Après quelques minutes de fâcheuse humeur à cause de nos rires en cascade car il pense qu’on se moque de lui, Samuel finit lui-même par sourire de son petit accident. La confortable navigation nous permet de terminer le livre de « Bilbo le hobbit » lu à vois haute par Simon pour le plus grand plaisir de nos trois loustics.

Ce soir, c’est croque-monsieur pour les garçons et jeûne pour maman. Vers 20h30, Nino endosse salopette et cirée et démarre le premier quart* avec son papa. Pour passer le temps et parce que Nino, comme chacun sait, est un fan de livres, Simon a la riche idée de démarrer « Un sac de billes » durant leur quart. Pas très gai mais au programme d’histoire des CM2. Combinons donc l’utile à l’agréable. A minuit, c’est mon tour. Je vais réveiller Adam qui saute tout joyeux de son lit et part s’habiller à son tour. Tandis que Simon ronfle paisiblement sur la banquette du cockpit, Adam me raconte des histoires et me tient éveillée malgré ma forte tendance à la somnolence jusqu’au passage de relai de 4h. Il tient bon encore une bonne demi-heure avec son papa puis file sous sa couverture les yeux pleins de sommeil. On sent que les enfants prennent un vrai plaisir à vivre ces moments exceptionnels et c’est une joie pour nous de partager ça avec eux. Samuel souhaitait faire le dernier quart mais impossible de réveiller le petit chou à 4h du matin. Il termine sa nuit bien pelotonné dans sa couette jusqu’à 9 heure.

4 reflexions sur “On gagne l’Espagne

  1. Krysfil

    Bonjour a tous, nous suivons votre parcours avec un peu de nostalgie… Que de bon moment en perspective. Je vois que vous avez commencé a rencontrer quelques batos copain, c’est là que réside le meilleur. Pour la piscine de Carthagène, de mémoire elle ferme à partir du 15 septembre. Quant a Malaga, le port était inaccessible pour nous pauvre plaisancier. Nous avions donc été à Benalmadena un poil plus au sud ouest. Vous y trouverez des bus très facilement pour Malaga.
    Nous vous souhaitons une bonne escale à Almerimar qui est un peut moche mais dont le pub a 30 mètres sur le quai est bien sympa.
    Bises et à bientôt.

    Les Krysfil

  2. Yo

    Je me régale à vous lire les copains! Quelle aventure, ça donne vraiment envie! J’ai eu l’occasion de faire un peu de voile avec mon papa et j’en garde de merveilleux souvenirs.
    Je m’attendais à trouver le nom de notre prochain spectacle dans votre petit glossaire: « vent debout » … Que nenni!
    Bon vent à vous en tous cas, hâte de lire la suite de vos aventures!
    Grosses bises!

  3. Nathalie B

    Coucou les Krysfil j’espère que vous allez bien.
    Suite à votre mail j’ai le plaisir de suivre une nouvelle aventure avec Charlotte, Simon et leurs enfants.

  4. Anne-Laure / IA ORANA

    Coucou!
    Aaaaah c’est marrant, nous on a a-do-ré Carthagène. On aurait pu s’y croiser, on y est resté 10j et on a décollé le 15/10. Mais c’est vrai que l’emplacement joue, nous étions au Real Club sur le quai qui donne directement sur la ville. On s’est aussi fait des copains marins, du coup, ça joue. On aurait pu y passer un bon mois.
    Mais je retrouve pleins d’impressions eues dans ton texte.

    Alors pour vous consoler sur la piscine, ils l’ont fermée la veille de notre arrivée – eh oui, fin de l’été, les espagnols sont frileux 😉

    Bon, à bientôt du coup!